Les 13 et 14 octobre 2011 s’est tenu à l’Université d’Angers un colloque au thème ambitieux : Les discriminations.
Sous ce titre, les organisateurs et intervenants ont abordé le sujet sous divers angles : selon le découpage académique (en particulier, en matière d’histoire des idées politiques avec l’intervention de X. Martin au sujet de « Inégalités, discrimination : l’apport des Lumières ») ; selon les domaines (au travers du droit européen, intervention de J. Andriantsimbazovina ; ou dans l’entreprise, intervention de B. Gauriau et de la discrimination positive par G. Calvés) ; puis selon des motifs particuliers (le sexe en matière criminelle par D.Guirimand ; l’âge par J. Fougerouse et l’origine ethnique par E. Aubin). Enfin, le colloque a abordé la délicate question des sanctions en matière pénale (intervention de M. Danti-Juan) et internationale (intervention de S. Touzé). Cette dernière question fut également abordée sous l’angle de la HALDE (intervention de M. Miné) et de « praticiens » (Me A. Fouquet, P. Mindu, H. Gosselin, B. Angibaud).
Au risque du subjectivisme, nous retiendrons quelques idées-forces qui se sont dégagées au cours de ces journées. Tout d’abord, G. Calvés a souligné le particularisme de la discrimination positive « à la française » qui instaure des quotas dans les processus de sélection (à l’instar de la parité) et non dans les résultats eux-mêmes. Elle se caractérise également par ses non-dits, notamment le refus de quotas « ethnoraciaux » qui pousserait, selon l’intervenante, à passer par des substituts plus ou moins transparents, comme la discrimination positive territoriale et la politique de zonage. Ensuite, J. Fougerouse a montré toute la difficulté d’appréhender le nouveau critère discriminatoire que constitue l’âge. En effet celui-ci constitue un véritable défi pour l’État providence, dont nombre de mesures sont directement fondées sur un critère d’âge (mesures en faveur des jeunes ou des séniors…). De surcroît, les individus en vieillissant passent d’un âge à un autre, d’un statut à un autre… L’intervenant a identifié une convergence des jurisprudences nationales et européennes dans le contrôle juridictionnel des mesures directement fondées sur l’âge, qui se déroule en trois étapes : établissement de la différence ; justification éventuelle ; vérification de la nécessité et de la proportionnalité de la mesure. E. Aubin, au travers l’étude d’arrêts récents s’est intéressé à la discrimination à raison de l’origine ethnique. Il aborde des jurisprudences dans des domaines très divers, qui touchent aussi bien l’accès à l’emploi public (CE 10 avril 2009), que la distribution de soupe au porc, que les chartes de la diversité… Au travers de ces divers exemples, l’intervenant conclut à une tendance à l’ethnicisation des rapports sociaux.
Enfin, il est important de souligner le travail important amorcé par B. Angibaud, procureur de la République à Angers. Son action peut constituer une référence dans la réalisation et la concrétisation dans la politique de lutte contre les discriminations. En tant que référent discrimination au parquet, elle a mis en place plusieurs opérations de testing : refus d’entrée en discothèque ; perquisition des ordinateurs d’une agence immobilière pour vérifier qu’il n’y a pas de fichier classant les éventuels locataires selon leurs origines ; refus de soin aux bénéficiaires de la CMU. Même si aucune de ces opérations n’a permis d’établir l’existence d’acte discriminatoire, il convient de souligner l’audace (l’enquête relative aux bénéficiaires de la CMU ne relève pas d’un critère discriminatoire défini dans le Code pénal) et la persévérance de la procureure d’Angers.